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La pollution lumineuse

Sucre en Bolivie photographié en 2001. Document F.Guinepain

L'usage des filtres anti-pollution lumineuse (II)

Par nature, les nébuleuses et les galaxies brillent excessivement moins que les planètes et offrent une surface de faible densité et souvent de petite dimension. Pire, dans nos banlieues, ces objets se distinguent à peine du fond du ciel qui est relativement brillant en raison de la pollution lumineuse ou pour d'autres raisons (brume, poussières, aurore, pleine Lune, etc).

Tous ces facteurs et bien d'autres comme la présence d'étoiles brillantes ou de nuages sombres réduisent le contraste entre les objets célestes et le fond du ciel et rendent l'observation des objets du ciel profond parfois très difficile.

Pour résoudre ce problème, nous devons trouver une méthode pour réduire toute cette "pollution" afin d'augmenter le contraste entre ces objets et le fond du ciel. C'est le rôle joué par les filtres anti-pollution lumineuse ou LPR en abrégé (Light Pollution Rejection filter) et autre filtre CLS dit à contraste.

Cette catégorie spéciale de filtres à bande plus ou moins étroite présente la caractéristique de réduire les raies d'émission indésirables de l'éclairage public ce qui permet d'accentuer les détails dans les objets du ciel profond en isolant les raies spectrales dans lesquelles ils brillent de tous leurs feux.

Un filtre LPR est très utile lorsque l'éclairage urbain est très puissant. Et contrairement à ce qu'on pense, un filtre LPR est également très efficace sous un ciel très sombre pour accenter la couleur des objets du ciel profond par voie photographique. Un filtre LPR ne va pas rendre les objets plus brillants mais en augmentant leur contraste, ceux-ci sembleront plus lumineux.

Notons qu'un filtre à bande large comme le CLS diminue voire bloque non seulement les raies d'émission de l'éclairage public au sodium et au mercure mais également celles des lueurs nocturnes vertes et rouges. Toutefois ce filtre présente une perte de transmission et des distorsions chromatiques sur les optiques les plus lumineuses (< f/3), raison pour laquelle on conseille d'utiliser le CLS sur des optiques ouvertes entre f/3 et f/15 même s'il donne encore d'excellents résultats sur les optiques ouvertes entre f/1.4 et f/2. De plus, étant donné que certains amateurs utilisent des sensibilités très élevées (3000-4000 ISO) pour réaliser des panorama à basse résolution de la Voie Lactée, ces (légères) aberrations optiques sont noyées dans la faible résolution, dans le bruit électronique ou dans les défauts de guidage.

A télécharger : Spectre de l'éclairage public (.xls)

Spectre des sources lumineuses

Lampe au sodium basse pression

Lampe au sodium haute pression

Lampe aux vapeurs de mercure

Lampe à incandescence (2620 K)

LED blanche chaude (3000 K)

LED blanche froide (4000 K)

Lampe Fluocompacte (6000 K)

Coucher du Soleil (3614 K)

Lumière du jour à midi (5561 K)

Documents T.Lombry

Ainsi que nous l'expliquerons dans l'article comparant les filtres Ultrablock et UHC (en anglais), parmi les meilleurs filtres commercialisés citons le Lumicon UHC et l'Ultrablock d'Orion Telescopes & Binoculars (cf. leur site en français) qui sont des filtres LPR dit "Nebula" à bande étroite par opposition aux filtres LPR classiques à large bande comme le filtre "Deep Sky" de Lumicon ou le "Skyglow" d'Orion qui conservent une transmission dans la partie rouge du spectre.

Vous pouvez également acquérir un filtre "Nebula" dit "à raie" qui ne transmet qu'une ou deux raies spectrales étroites centrées sur la raie Hα, SII (soufre) ou OIII (oxygène) et conçu spécialement pour la photographie des nébuleuses ionisées y compris les rémanents de supernovae, un filtre Hβ pour observer les nébuleuses pâles et un filtre "DeepSky" pour observer les nébuleuses de réflexion.

Mis à part Lumicon, les entreprises Astronomik, Baader Planetarium, Optolong et Thousand Oaks Optical proposent également un large éventail de filtres LPR visuels et photographiques (CCD) qu'on retrouve chez leurs représentants européens dont Optique Unterlinden.

Concernant les prix, en 2018 un filtre Lumicon UHC de 31.25 mm (1.25") revenait à 129 € (100 € de moins qu'en 2015 !), un modèle de 50 mm (2") revenait à 259 € et un filtre UHC à monture Clip pour Canon EOS revenait à 219 €. Enfin, un filtre CLS à monture Clip pour Canon EOS revient à 129 € chez Astronomik (dont voici la courbe de transmission) et à 95 € chez Optolong. Ces deux filtres sont un peu plus opaques qu'un filtre LPR à large bande.

A lire : Les filtres colorés et sélectifs (sur ce site)

Réponse spectrale des filtres LPR communs

Effet d'un filtre LPR sur une lampe au sodium HP. On comprend pourquoi certains astrophotographes ne sont pas effrayés par la pollution lumineuse. Document IDA.

LPR Broadband (large bande)

LPR Narrowband (bande étroite)

O-III

H-beta

Y a-t-il un effet du diamètre et du grossissement sur la pollution lumineuse ?

L'influence du diamètre de votre instrument sur l'effet de la pollution est un leurre, un faux débat probablement entretenu par la mauvaise interprétation d'études scientifiques. En effet, dans des conditions identiques, quelle que soit l'ouverture d'un instrument, si la pupille de sortie (le diamètre du cône lumineux sortant de l'oculaire) est identique, la quantité de lumière sera équivalente. Cela veut dire que contrairement à ce qu'on pourrait penser, dans ces conditions le petit télescope donnera un fond de ciel aussi brillant que celui observé à travers un grand télescope.

En d'autres termes, si la pupille de sortie reste constante, ce n'est pas l'augmentation du diamètre de l'instrument qui augmentera la brillance de la surface des objets étendus (nébuleuses, galaxies ou comètes) et accentuera leur contraste mais le grossissement comme indiqué dans le tableau ci-dessous (simulation effectuée avec le fichier EP.xls).

Instrument

Focale de

l'oculaire

Diamètre de la

pupille de sortie

Grossissement

100 mm f/10

40 mm

4.0 mm

25 x

200 mm f/10

40 mm

4.0 mm

50 x

200 mm f/10

80 mm

8.0 mm

25 x

L'explication est la suivante. L'augmentation de lumière croît comme le carré du diamètre (un télescope de 200 mm d'ouverture recueille 4 fois plus de lumière qu'un instrument de 100 mm) et la brillance de surface d'un objet étendu varie en fonction de l'inverse du carré du grossissement et est directement proportionnelle à la quantité de lumière reçue. Ainsi, en utilisant un instrument de plus grand diamètre, le fait d'augmenter le grossissement permet de maintenir la pupille de sortie constante tout en disposant d'un collecteur de lumière plus important. C'est pourquoi les objets étendus paraîtront plus brillants quelles que soient les conditions atmosphériques. Le fait qu'il y ait ou non de la pollution n'y change rien. L'augmentation de contraste apparaîtra surtout dans l'observation des amas d'étoiles et dans une moindre mesure sur les surfaces planétaires.

Ce sont les lunettes astronomiques qui présentent le contraste le plus élevé malgré leur diamètre inférieur, du fait qu'elle sont libres de toute obstruction (un télescope Schmidt-Cassegrain tel le Celestron Nexstar 5 présente une obstruction pouvant atteindre 40% du diamètre). On y reviendra en détail à propos de la qualité des optiques.

Enfin, certains observateurs évoquent la sensibilité des cellules de la rétine et de l'interprétation du cerveau pour expliquer ces différences de contraste en fonction du grossissement (les cellules recevant plus ou moins de lumière). Ici aussi la logique est plus forte que les pseudo-arguments des amateurs. Par définition, le champ d'un oculaire étant fixe, quel que soit le grossissement utilisé la taille de l'image du fond du ciel demeure inchangée. C'est pourquoi on dit que le grossissement est directement proportionnel à l'ouverture de l'instrument, la pupille de sortie demeurant constante (voir le tableau). Dans ces conditions on peut donc en déduire que le fond du ciel présentera une intensité constante parce que la lumière sera répartie également sur les cellules de la rétine. C'est en revanche la distribution des cônes et des bâtonnets sur la rétine qui modifiera l'aspect des objets en fonction de leur chromaticité, ceci étant principalement valable pour des objets ponctuels.

A gauche, le site d'observation choisi par le talentueux Robert Gendler. A l'avant-plan son télescope Ritchey-Chrétien Cassegrain de 317 mm f/9 construit par Optical Guidance Systems. A droite, le ciel d'Orion photographié par Matt Aust sans et avec filtre CLS d'Astronomik fixé dans un APN Canon EOS 6D muni d'un objectif Sigma ART 24-35 mm à 24 mm f/2.8, exposition de 153 s à 800 ISO + 212 s pour l'avant-plan).

En conclusion, même si vous habitez dans un endroit pollué par la lumière, n'hésitez pas à sortir votre télescoposaure à l'image de l'installation de Robert Gendler présenté ci-dessus à gauche.

En revanche, il faut bien être conscient que l'effet de la turbulence, toujours très présente dans les agglomérations, peut être en défaveur d'un télescope de plus de 400 mm d'ouverture. En effet, les cellules convectives et les courants turbulents ont une dimension variant entre 50 cm et 1 mètre. Le faible diamètre et la faible résolution des petits instruments masquent la détérioration des conditions d'observation qu'un observateur averti discernera à forts grossissement dans un grand télescope. Mais ceci est une autre histoire qui fait l'objet d'un article spécial consacré au choix d'un site astronomique.

Finalement si la pollution lumineuse est trop importante et que souhaitez vraiment observer ou photographier le ciel dans les meilleures conditions, pourquoi ne pas vous déplacer vers des cieux plus cléments ? Ne fut-ce que pendant les vacances, faites-vous plaisir et choisissez un lieu désertique ou d'altitude éloigné de toute agglomération.

A ce sujet, il existe des "Astro-Inn" spécialisés dans ce type de vacances et équipés d'instruments de large diamètre et des dernières technologies. Là, dans le Val d'Aoste, dans les Pyrénées, à Ténériffe, au Chili, dans une île de l'océan Indien ou du Pacifique ou encore dans le désert, les étoiles de magnitude 6 brillent comme des diamants sur le velours noir du ciel. C'est un merveilleux spectacle que vous n'oublierez jamais...

Les méfaits du passage des satellites

Depuis peu il existe un autre type de pollution lumineuse qui touche principalement les astrophotographes, qu'ils soient amateurs ou professionnels : les constellations de satellites artificiels.

La photo présentée ci-dessous à droite montre ce qui arrive quand des astronomes professionnels essayent de photograhier une supernova dans une galaxie lointaine (SN2019ein au SE de NGC 5353) juste au moment où monsieur Elon Musk lança sa constellation de satellites Starlink le 24 mai 2019, sans dommage prétendait-il dans un tweet pour l'astronomie professionnelle car leur éclat allait diminuer avec le temps... Si c'est exact, avec des temps d'intégration CCD de plusieurs heures, ces constellations de satellites laisseront toujours des traces sur les photographies du ciel profond et peuvent également perturber les sondes de guidage des télescopes.

A voir : The 60 satellites of Starlink-6 filmed over Paris, 23 April 2020, T. Legault

60 Starlink satellites passing over Paris, 31 Dec 2019, T. Legault

SpaceX Starlink satellite train at dusk, 26 mai 2019

SpaceX Starlink Satellites Spotted Over Netherlands, 24 mai 2019

57000 satellites en 2030, Analytical Graphics

A gauche, compositage de 300 photos exposées 13 secondes soit 65 minutes durant les Perséides le 12 août 2018 entre 22h57 et 0h07 TU. Photos prises depuis Waldenburg en Allemagne. Le champ couvre 84°x62°. La plupart des lignes sont provoquées par des satellites éclairés par la lumière du Soleil. C'était avant le lancement des Starlink. Ca présageait le pire...  A droite, une photographie du groupe de galaxies NGC 5353/4 réalisée avec le télescope de l'Observatoire Lowell en Arizona dans la nuit du samedi 25 mai 2019. Les lignes diagonales qui traversent l'image sont des traînées lumineuses laissées par le passage de plus de 25 des 60 satellites Starlink lancés la veille par SpaceX en orbite basse (LEO) alors qu’ils passaient dans le champ de vision du télescope. Bien que cette image illustre l’impact des constellations de satellites, il faut noter que la densité de ces satellites est nettement plus élevée dans les jours qui suivent leur lancement (comme on peut l e voir ici) et que la luminosité des satellites diminuera à mesure qu’ils atteindront leur orbite opérationnelle. Document Eckhard Slawik/UAI et Victoria Girgis/Lowell Obs./UAI.

L'UAI a rapidement relayé les inquiétudes des astronomes dans ses actualités du 3 juin 2019 et a repris les photos présentées ci-dessous. Elle a notamment déclaré : "L'Union astronomique internationale (AIU) est préoccupée par ces constellations de satellites. L'organisation, en général, embrasse le principe d'un ciel sombre et radio-silencieux qui est non seulement essentiel pour faire progresser notre compréhension de l'Univers dont nous faisons partie, mais aussi comme une ressource pour toute l'humanité et pour la protection de la faune nocturne. Nous ne comprenons pas encore l'impact de milliers de ces satellites visibles dispersés dans le ciel nocturne et malgré leurs bonnes intentions, ces constellations de satellites peuvent menacer les deux.[...] Nous exhortons également les agences appropriées à définir un cadre réglementaire pour atténuer ou éliminer les impacts négatifs sur l'exploration scientifique dès que possible."

Jusqu'aux années 2000, aux latitudes moyennes, on disposait encore de quelques heures pour prendre des photos du ciel à grand champ avant de voir un satellite traverser le ciel. Aujourd'hui, sans parler des avions, il y a en permanence entre 1 et 40 satellites visibles à tout moment dans le ciel à la latitude de 50° et leur nombre sera dix fois supérieur dans quelques années (cf. cette simulation du ciel lorsque les 65000 satellites de Starlink, Amazon, OneWeb et StarNet/GW seront opérationnels).

Désormais, les astrophotographes professionnels comme amateurs devront vérifier les heures de passages des satellites artificiels pour s'assurer qu'ils ne traverseront pas le champ de leurs photographies. Heureusement, plus le champ est réduit plus ils ont de chances de les éviter (par exemple en utilisant un téléobjectif ou en réalisant des photographies au foyer d'un télescope). Mais on comme on le voit ci-dessous, même dans un champ de quelques degrés, il reste toujours assez de place pour gâcher les photos !

A gauche, une photo de la nébuleuse d'Orion M42-M43 prise en décembre 2019 zébrée par le passage des satellites dont ceux de Starlink après une exposition totale de 203 minutes. Document Amir H. Abolfath. Au centre, des satellites, des avions, des rayons cosmiques et même des pixels défectueux ont laissé leur trace sur cette photo de la galaxie d'Andromède M31. Il s'agit de l'empilement de 223 images, chacune exposée 300 secondes. Heureusement, grâce à la technique de l'empilement, lors du pré-traitement d'image il est possible de ne retenir que celles dépourvues de traces, ce qui permet de nettoyer l'image de toute trace parasite. Document Kees Scherer/Flickr. A droite, traces spectaculaires de la constellation de satellites Starlink dans le champ de l'étoile double Albiréo du Cygne le 26 décembre 2019. Il s'agit de l'empilement de 10 images exposées chacune 150 secondes. Document Rafael Schmall. Il va sans dire qu'il est impossible de réaliser des photographies du ciel profond dans ces conditions.

À ce jour, la Commission Fédérale des Communications américaine (FCC) a déjà approuvé la mise en opération de plus de... 40000 satellites de SpaceX en orbite basse jusqu'en 2027. La constellation qui coûtera 10 milliards de dollars générera plus de 30 milliards de revenus annuels en souscriptions et ventes de hardware (antenne, etc).

Aussitôt que ces satellites furent lancés, l'IDA s'est inquiétée des conséquences de la poursuite du développement et de l'approbation fédérale du lancement de ces satellites quand on sait que l'association lutte depuis 1988 pour préserver le ciel nocturne. Comme l'UAI, elle a donc exhorté toutes les parties à prendre des mesures de précaution pour protéger l'environnement nocturne avant le déploiement de nouveaux groupes de satellites à grande échelle. Manquait plus que cette pollution ci ! :-(

Mais ce n'est pas tout car les satellites destinés au réseau 5G (communications à très haut débit entre 30-300 GHz) et à Internet risquent à terme de perturber les communications des satellites météorologiques qui recueillent des données cruciales sur le climat (cf. A.Wize, "Nature", 2019). Ainsi OneWeb (UK), Telesat (Ca), Kuiper (Amazon), StarNet/GW (Chine) et Roscosmos (Russie) envisagent de placer sur orbite plus de 65000 petits satellites de télécommunication, principalement pour Internet. Ce déploiement signifierait qu'à moyen terme l'espace proche serait encombré de près de 125000 satellites opérationnels contre ~4000 satellites en 2021 !

Face à ces perturbations potentielles, l'OMM a d'ailleurs exprimé sa préoccupation à l'UIT lors de la conférence WRC-19. En général, ces préoccupations sont suivies d'effets.

Début 2020, une pétition internationale fut lancée dans le but d'interdire ou tout le moins suspendre le déploiement de ces satellites qui nuisent au travail des astronomes jusqu'à ce qu'une évaluation approfondie de leur impact soit conduite. La pétition a été été signée par environ 2050 astronomes. C'est très peu quand on sait que l'UAI rassemble près de 14000 astronomes. Qu'ils ne viennent pas ensuite se plaindre qu'ils ne sont pas écoutés et perdent leur fenêtre sur le ciel...

En juillet 2020 et en juillet 2022, des astronomes ont rencontré des représentants d'entreprises privées, des avocats spécialistes en droit de l'espace ainsi que des représentants du gouvernement américain, pour élaborer des compromis et des stratégies pour réduire ces nuisances. Les entreprises ont testé des moyens de réduire la réflectivité des satellites, comme par exemple ombrager le satellite avec une "visière" ou le peindre en noir mat. D'autres stratégies proposées consistent à limiter les satellites aux orbites basses où ils se déplacent plus rapidement dans le ciel et laissent une traînée plus faible dans les images télescopiques. En effet, contre-intuitivement les satellites en orbite LEO créent moins de soucis pour les astronomes car ils s'éloignent rapidement.

Mais actuellement tout cela est à l'état d'étude et il n'existe aucune loi pour réglementer le lancement et les orbites des satellites.

A lire : L'observation des satellites artificiels

Les impacts en astronomie

Une étude de l'ESO publiée le 5 mars 2020 a montré que les futures observations au VLT et ELT seront ""modérément impactés" par les constellations en cours de développement. L'effet sur les longues expositions (de quelque 1000 s) sera plus prononcé en revanche : 3% de ces observations effectuées à l’aube ou durant le crépuscule pourraient être inexploitables. Les expositions de plus courte durée seraient moins impactées – moins de 0.5% d’entre elles seraient affectées. [...] L'étude révèle également que les sondages étendus, effectués au moyen des grands télescopes notamment, seraient les plus impactés. A titre d’exemple, 30 à 50% des expositions effectuées grâce à l’Observatoire Vera C. Rubin (ex-LSST) seraient “sévèrement impactées” selon l’époque de l’année, l’heure de la nuit et les hypothèses simplificatrices utilisées dans le cadre de cette étude."

Cette image combine 515 photos exposées chacune 20 s entre 1600 et 6400 ISO et d'une durée totale de 3h15 réalisées avec un APN Canon EOS R5 muni d'un fish-eye TTArtisan de 11 mm f/2.8 fixé sur une monture Star Adventurer Mini. Le champ couvre 120°. Elle montre tous les satellites (et quelques avions mais probablement aucun Starlink) enregistrés entre 23h23 et 2h38 locale, la nuit du 1er au 2 juin 2022 à la latitude 51°N, où les satellites sont illuminés toute la nuit. Document Alan Dyer/Flickr.

L'étude révèle également que "quelque 1600 satellites des constellations Starlink peupleront le ciel de tout observatoire situé aux latitudes moyennes. La plupart d'entre eux se situeront à moins de 30 degrés au-dessus de l’horizon local. Au-delà, soit dans cette portion du ciel faisant l’objet de la plupart des observations astronomiques, se trouveront quelque 250 satellites des constellations à tout instant. [...] Une centaine de satellites sera suffisamment brillant pour être aperçu à l’oeil nu durant l’aube ou le crépuscule, et 10 d'entre eux se situeront à plus de 30 degrés au-dessus de l’horizon. [...] Dans l’ensemble, ces nouvelles constellations de satellite devraient doubler le nombre de satellites visibles à l'oeil nu dans le ciel nocturne à 30 degrés ou plus au-dessus de l’horizon".

Plus récemment, dans une étude publiée dans "The Astrophysical Journal" en 2022, Przemek Mróz de l'Observatoire Astronomique de l'Université de Varsovie et ses collègues comprenant des représentants de l'ESO, du Caltech, de l'Université de Berkeley, du LBNL et de Weights & Biases, Inc., ont évalué l'impact des satellites Starlink sur les programmes d'astronomie.

Selon les chercheurs, l'installation photographique Zwicky Transient Facility (ZTF) installée au Mont Palomar est déjà affectée, alors même que seul 1/40e de la constellation finale des satellites est en orbite. En 2021, alors que seulement quelque 1000 satellites Starlink avaient été lancés, près de 20% des images crépusculaires prises par le télescope présentaient des traînées. C'est également le cas pour les astronomes amateurs.

La situation est encore plus pénalisante pour les télescopes plus sensibles, comme le télescope Simonyi Survey de 8.4 m de l'observatoire Vera C. Rubin (LSST), actuellement en construction au Chili. Sa caméra CCD de 3.2 gigapixels capturera environ 1000 images du ciel de 9.6 degrés carrés chaque nuit pendant 10 ans. Chaque image peut détecter des objets jusqu'à la magnitude photographie d'environ 24.

Les chercheurs estiment que jusqu'à 30% des images contiendront au moins une traînée d'un satellite Starlink de deuxième génération (Gen-2). De plus, un seul satellite Starlink d'une magnitude de 5 corromprait non seulement directement les pixels, mais produirait également une bande parallèle de pixels saturés d'au moins 100 pixels de large de chaque côté de la traînée. Chaque photo de 30 secondes prise au crépuscule présentera au moins une trace d'un satellite Gen-2, de sorte que jusqu'à 3% de la zone d'image devra être ignorée même si les satellites sont atténués à la magnitude 7, ce qui équivaut à perdre plusieurs mois d'observation.

S'ajoute le risque de collision. A terme, plus de 20000 satellites Gen-2 seront placés vers 547 km d'altitude et seront séparés horizontalement de 120 km. La plupart orbiteront sous l'orbite de la station ISS et représenteront un risque non négligeable d'impact pour tous les satellites en orbite basse (LEO).

Pour suivre l'évolution à long terme de la "pollution" créée par ces milliers de satellites, un forum public "Satellite Streak Watcher" a été ouvert où chacun peut déposer ses photos de traînées de satellites. Des chercheurs s'en serviront pour évaluer les nuisances et leur impact sur les sessions d'observations du ciel par les astronomes professionnels notamment.

L'avenir de l'astrophotoghraphie ne s'annonce pas sous un ciel clément...

Pour plus d'informations

L'observation des satellites artificiels (sur ce site)

Les filtres colorés et sélectifs (sur ce site)

Choisir un site d'observation astronomique (sur ce site)

Spectre de l'éclairage public (feuille Excel, .xls)

Astronomical filters spectral transmission, Christian Buil

Fabricants de filtres LPR et CLS : Astronomik, Baader Planetarium, Lumicon, Omega Filters, Optolong, Thousand Oaks Optical

Dealers : Astroshop.eu, La Maison de l'Astronomie, Médas Instruments, Optique Unterlinden, Teleskop Express, Orion Telescopes & Binoculars (en français)

A guide to spectra, A.Riedel/GSU

Pollution lumineuse ou photopollution, Notre Planète

Sky Quality Meter (appareil de mesure de la qualité du ciel Unihedron)

Mesure de la qualité du ciel nocturne avec un APN (PDF), ASCEN

Roadpollution (logiciel)

Suomi NPP, NASA (mission du satellite et cartes "black marble")

International Dark-Sky Association (IDA, USA)

Artificial Light at Night: State of the Science 2022 Report, IDA, 2022

NamibRand Nature Reserve: first Dark Sky Reserve (sur le blog)

Light Pollution Map (cartes de la pollution lumineuse)

Google Earthbuilder (cartes de la pollution lumineuse)

Site web de Pierantonio Cinzano

Mesure de la brillance du ciel pour amateurs (P.Cinzano)

Association pour la Sauvegarde du Ciel et de l'Environnement Nocturnes (ASCEN, Belgique)

Association Nationale pour la Protection du Ciel et de l'Environnement Nocturne (ANPCEN, France)

In Chile, world's astronomy hub, scientists fear loss of dark skies, Daily Mail, 2015

Shedding Light on Dark Skies: Build a "Dark Meter" and New Dark-Sky Rating Scale, John E. Bortle, Sky and Telescope, Feb 2001

Visual Estimations of Night Sky Brightness, Chadwick A. Moore, The George Wright Forum (PDF)

Light Pollution Awareness

Campaign for Dark Skies (BAA)

Astronomical Society of the Pacific - Light Pollution

NASA Global City Light catalog

Pollution, The vanishing Universe, D.McNally, Cambridge University Press, 1994.

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